dimanche 31 juillet 2022

St-Jacques de Compostelle

J'ai passé une bonne nuit d'un sommeil récupérateur. Ce stage était passionnant, mais il me semble que je n'ai pas eu le temps de l'intégrer. Ce n'était pas juste un cours intéressant, il charriait les énergies intemporelles de la géométrie sacrée qui est partout dans la création. J'ai l'impression d'avoir suivi les enseignements avec mon ADN, ...je n'arrive pas à le dire mieux. C'est venu réveiller des mémoires enfouies en moi de longue date; je suis par exemple convaincue d'avoir vécu plusieurs vie comme enlumineur, calligraphe, probablement compagnon maçon. Je sais les symboles traditionnels sculptés par les bâtisseurs de cathédrale et véhiculant une connaissance millénaire, Henri Vincenot m'en a redonné une mémoire vivace dans son roman «Les étoiles de Compostelle». Avant les druides, on dit que la Connaissance viendrait des Atlantes. Les druides, persécutés et éradiqués par les Chrétiens, ont transmis leur savoir dans les écritures saintes. J'ai dû être de ces moines copistes qui, au milieu d'un évangile, rajoutaient quelques phrases plutôt hermétiques mais pleines de sens pour qui savait. Les maçons de la première heure figeaient dans la pierre des cathédrales les représentations païennes des traditions celtes, inspirées d'ailleurs du culte d'Isis en Egypte. Les Rose-Croix d'abord et les Francs-Maçons d'aujourd'hui conservent jalousement une grande part de cette mémoire qui est la tradition des Européens. 

Il me revient en mémoire une prophétie des indiens Hopi : 

Au début, le Grand Esprit est apparu, il a rassemblé les peuples de cette Terre, dit-on, sur une île qui est maintenant sous les eaux et il a dit aux êtres humains: «Je vais vous envoyer dans les quatre directions, je vais vous répartir en quatre couleurs, je vais vous donner mon savoir et vous l'appellerez: «Les Enseignements Originels». Et quand vous vous rassemblerez à nouveau, vous les partagerez afin de pouvoir vivre en paix sur cette Terre et ce sera le début d'une grand civilisation.

À l'ouest, au peuple rouge, le peuple indien, il donna la Garde de la terre. Pendant ce cycle, nous devions apprendre les enseignements de la terre, les plantes qui poussent du sol, les nourritures que nous pouvons manger, les herbes qui soignent et partager ce savoir avec nos autres frères et soeurs pour que quelque chose de bien puisse arriver sur Terre.

Au sud, il donna au peuple jaune la Garde du Vent. Ils devaient tout apprendre sur le vent et la respirations et comment l'assimiler en nous pour notre avancement spirituel.

À l'est, il donna au peuple noir la Garde de l'Eau. Ils devaient apprendre les enseignements de l'élément principal, à la fois le plus humble et le plus puissant.

Au nord, il donna au peuple blanc la Garde du Feu. Il est au centre de toutes ses activités: les ampoules électriques, l'étincelle du moteur à explosion, etc. Le feu consume mais avance également, c'est pourquoi ce sont les frères et soeurs blancs qui commencèrent à voyager à la surface de la terre pour nous réunir en une grande famille.

J'ai retrouvé cette prophétie sur internet et ça vaut ce que ça vaut, il semblerait que les interprétations soient nombreuses et variées. Quand on m'a relaté cette prédiction, il était dit que le peuple blanc devait encore retrouver la mémoire de sa tradition pour qu'enfin la réunion des quatre peuples puisse avoir lieu et que commence l'Âge d'Or. C'est ce qui m'a poussée, en son temps, à découvrir de quoi était faite notre tradition celtique: il s'agit entre autres des secrets des alchimistes. Le feu transformateur, le Grand Œuvre. Avec le temps, la mémoire collective s'est effacée et ceux qui détiennent la mémoire écrite font l'erreur de ne pas la partager. 

C'est tout cela que je commence à digérer confusément ce premier jour à St-Jacques de Compostelle et que je finirai de pouvoir mettre en mots une dizaines de jours plus tard. 


Vue de notre terrasse




Mais pour l'heure: CAFÉ ! Echange sur le groupe Whatsapp «Santiago Girls» nouvellement créé: nous sommes prêtes, rendez-vous pour le petit déj. grâce une épingle sur Google Maps. — Vive la technologie!

Oups, non, nous sommes bloquées à l'intérieur, le verrou est cassé. — Non mais c'est quoi ces turbulences? Alors il est où, mon océan de béatitude? Où sont la grâce et l'aisance? Il faut appeler à nouveau Pilar qui va devoir se déplacer, un verrou ne peut être réparé à distance. Enfin, pas encore. Fabienne est légèrement claustrophobe, elle se sent mal à l'idée d'être coincée ici. Je n'aime pas non plus, mais nous avons une terrasse de laquelle nous pouvons sauter, c'est un peu acrobatique mais faisable. Pour ma part, j'ai une totale confiance qu'on va venir nous délivrer. Je suis une indécrottable optimiste...

Il a y une porte qui donne directement sur la rue, Pilar l'ouvre de l'extérieur et pénètre dans notre kitchenette. Elle démonte le montant de la serrure, répare.... et voilà! Elle nous donne une clef de la seconde porte pour plus de sûreté et nous pouvons rejoindre nos amies. 

Après le petit déjeuner, nous allons visiter à la cathédrale IUne queue interminable serpente sur le parvis au milieu d'une foule de touristes, ça va prendre des heures pour entrer. Nous réalisons que nous sommes dimanche et que cette foule va participer à la messe. 

















Avec la coquille, qui est vraiment partout à St-Jacques

Mais au fait, comment la coquille Saint-Jacques est-t-elle devenue le symbole que nous connaissons aujourd’hui? L’origine de ce signe trouve en partie sa source dans certaines légendes entourant l’arrivée du corps de Saint Jacques en Espagne. Une tradition fait en effet état, qu’après le martyre de l’apôtre Jacques à Jérusalem en l’an 44, son corps fut emmené en Espagne. Au moment où le bateau accosta, un cheval pris peur et tomba à l’eau, entraînant son cavalier avec lui. Selon la légende, le cavalier et sa monture furent tous les deux miraculeusement sauvés, et sortirent indemnes de l’eau, couverts de coquilles Saint-Jacques. (Source)



Pêle-mêle touristes et pèlerins


Nous entrons par le côté où la queue est moins longue et nous visitons une partie seulement de l'édifice pendant que le curé commence sa messe en espagnol. J'adorerais voir l'encensoir géant, mais je ne suis pas sûre qu'il soit systématiquement utilisé et je n'ai pas envie de m'appuyer une messe... Cela dit, l'ambiance est extraordinaire. Je comprends que le curé englobe les pèlerins dans la célébration, c'est émouvant. 






Depuis le début de ce voyage mais plus encore à St-Jacques, je sens dans l'air une atmosphère vraiment particulière. La ville est envahie de touristes mais la présence des pèlerins est palpable et un nuage de solennité imprègne tout. J'ai l'impression que ça rend les touristes inoffensifs. On a envie de respect. De tout. Des pèlerins qui achèvent leur chemin mais aussi ceux qui les accueillent, des aubergistes aux restaurateurs en passant par les musées et même les échoppes de souvenirs. 

Dans une des nombreuses rues pavées du centre que nous empruntons en quittant l'esplanade devant la cathédrale, je croise un homme jeune, musclé, bronzé. Il est pieds nus et porte un sac énorme. Il a l'air très lourd, ce sac, mais l'homme ne semble pas le sentir, c'est comme s'il était greffé dans son dos. Il a un regard à la fois hagard et incroyablement profond. C'est une rencontre fugace, je ne fais que le croiser alors qu'il touche à son but, là, à trente mètres, mais le sait-il qu'il y est incessamment? J'ai envie de le suivre pour voir sa réaction, mais je me retiens, ce serait indécent. Il est absent au reste du monde et incroyablement présent dans toute la création. Il porte son chemin et son chemin le porte, parce que j'ai l'impression qu'il glisse sur les pavés comme un patineur. 

Il fait toujours très chaud et nous nous réfugions dans le musée de la cathédrale. Il fait faim. Le Tapas Bar nous offre une variété archi-délicieuse de tapas et la sangria y est savoureuse. 



   


       

    




Nous écumons ensuite quelques magasins, une bijouterie et un petit magasin qui vend des biscuits et des alcools traditionnels tout en déambulant nonchalamment dans les rues de la ville.


Nous finissons la visite du musée que nous avions interrompue pour cause de déshydration et nous passons à l'hôtel de Stephanie et Renee pour déposer nos paquets. S'ensuit un petit épisode de sieste qui nous permet de récupérer de la grosse chaleur accablante.



Après cela, nous cherchons un endroit pour boire un Spritz, ça fait trop longtemps... Nous trouvons chez Momo qui est à deux pas de notre hôtel. L'endroit est bondé et bruyant, c'est l'heure de l'apéro. J'avoue, j'ai un petit moment de saturation. L'Espagne est bruyante. Joyeuse, mais bruyante.

Vitrail d'entrée de Chez Momo
C'est écrit... à l'envers




       


Puis nous allons manger sur une petite place juste en-dessous de l'hôtel des filles. Tout est à dix ou quinze minutes à pied et, comme à Madrid, nous retombons très souvent sur les endroits où nous sommes déjà venues et qui nous plaisent. Nous avons bien faim toutes les trois, nous commandons un peu trop. Il reste un plat de porc intact que Renee avait commandé en espérant autre chose et qui ne nous fait plus envie. Stephanie l'emporte en doggy bag. 



Nous nous quittons ensuite pour aller dormir. Stephanie racontera plus tard qu'elle est ressortie pour marcher un peu à la fraîche. Elle est arrivée sur l'esplanade de la cathédrale où il y avait un concert et elle a dansé un moment avec des gens dans la foule. Puis, elle a aperçu un pèlerin avec son chien qui mendiait avec une coquille St-Jacques. Elle a sorti le reste de porc et le lui a donné. Ses yeux ont brillé et il a partagé la ration avec son chien. 

Après une bonne douche, je me couche, fenêtre ouverte sur la nuit fraîche.

Silence... Dodo!

Oups, non, ça pète dehors! Il y a des feux d'artifice. 





Comme il est passé minuit et que nous sommes donc le 1er août, avec Fabienne, nous pensons que c'est à l'occasion de notre fête nationale. Pourquoi pas, n'est-ce pas? En tout cas, pour nous, ça l'est!

Cette fois, dodo!








samedi 30 juillet 2022

Astorga et train pour Santiago

C'est le jour du départ, nous nous levons tôt pour dire au revoir aux filles qui nous quittent avant huit heures. Il fait frais, ce matin, et nous prenons le petit déjeuner dans la cuisine, autour d'une table plus petite qui nous donne l'impression de nous coller les unes aux autres une dernière fois. C'est mignon, c'est plein d'amour.

Luis, notre chauffeur du premier jour, emmène Clarissa, Lyndal et Nuria à l'aéroport de Madrid pour prendre leur avion de retour. Un moment plus tard, un autre taxi emmène Paula et Alice à Leòn où elles vont chercher une voiture de location. Elles vont à la plage et à Bilbao pendant quelques jours avant de rentrer en Amérique. La voiture est en train de s'en aller à petite vitesse sur les pavés moyenâgeux quand Renée demande:

— C'est à qui, ce sac?

On crie, on gesticule, le chauffeur stoppe et revient. Paula a oublié sa valise. Au dernier moment, elle a empoigné un sac de sa fille en oubliant ses propres bagages. Acte manqué éloquent... Aurait-on de la peine à se quitter?

Stephanie, Renée, Fabienne et moi avons un train en fin d'après-midi au départ d'Astorga. Stephanie reste au gite pour travailler un peu et faire le bilan du stage avec Bertrand, Renée l'accompagne. Nous confions nos valises au coffre de la voiture de Bertrand au bas des escaliers de notre hôtel, impossible de les charrier sur cette route. Il amènera Stephanie, Renée et tous nos bagages à la gare en fin d'après-midi et il nous propose, à Fabienne et à moi, de nous y emmener tout de suite, car il a besoin de passer à la banque. 


Nous visitons le «Museo de los Caminos» dans le palais épiscopal de Gaudi, un des rares édifices qu'il a construits hors de Catalogne. On reconnaît bien le style de l'architecte de la fameuse Sagrada Familia, le palais a un petit air de Disneyland. 





    

Nous visitons aussi la cathédrale, encore du gothique surchargé qui ma foi, ne me plaît toujours pas, même si le travail est impressionnant. Au moins, il y fait frais. 







Il y a ce week-end un festival qui célèbre les Romains et les Asturiens. Depuis les remparts, nous voyons des tentes installées en contrebas, tout un parcours didactique sur cette époque avec un marché et des stands de nourriture. Dans la rue, une bonne partie de la foule se promène déguisée soit en Romains, soit en Asturiens. On se croirait dans Astérix et Obélix en vrai. Le premier centurion que je vois en conversation sonore sur son téléphone portable me fait hurler de rire. Les suivants, c'est la famille complète en patriciens élégants avec la petite dans le pousse-pousse. 









Nous nous asseyons à une terrasse dans l'espoir de boire un grand Spritz. — STOP! Il convient ici de parler du Spritz. À Madrid, spécialement dans notre jacuzzi sur le toit, nous avons souvent bu cet excellent cocktail pas très fort qui désaltère divinement en ces temps de canicule. De belle couleur ambrée, il est composé d'un tiers de Champagne (ou vin mousseux), d'un tiers de Schweppes et d'un tiers d'Apérol, un truc qui doit être horriblement chimique, vu la couleur orange pétard, et dont je ne veux pas savoir la composition. C'est proche du Campari, en un peu moins amère. Deux tranches d'orange, un wagon de glaçons et un petit parasol en papier ou autre décoration, et vous voilà au paradis pour un moment. En Espagne, c'est apparemment répandu seulement dans les grandes villes, on nous a dit que parfois, ils appellent ça seulement «Apérol».

Quand nous tentons la commande sur la terrasse d'Astorga, le garçon nous regarde avec des gros yeux. «Momento», dit-il, et il nous envoie son collègue qui semble comprendre l'anglais. Même gros yeux quand on dit «Spritz», il doit hésiter à nous dire «Santé!»... On essaye: «Apérol», mais non, décidément, ils n'ont pas. Alors c'est «Sangria». Ça, ils ont. C'est bon aussi!

Quelques tapas plus tard, nous reprenons notre déambulation dans les rues étouffantes de la ville. La température chatouille toujours les 40°, mais pendant le stage, on ne s'en rendait pas compte, le gite conservait bien la fraîcheur. Après avoir fait du lèche-vitrine, il faut nous réhydrater à nouveau. C'est encore plus chaud sur la terrasse suivante où nous finissons par être muettes de chaleur pendant que les Romains et les Gaulois continuent de marcher, mélangés aux humains du temps présent.



Nous avons rendez-vous à cinq heures à la gare qui est à dix minutes à pied. Nous nous y rendons bien trop à l'avance, dans l'espoir que le hall d'attente soit plus frais. Hélas! Elle est complètement vide, cette gare, et nous nous affalons sur un banc où il fait effectivement un chouia plus frais que dehors. Pas d'indication de voie pour notre train. Quand Bertrand arrive, il nous dira qu'il n'y a qu'une voie en fonction ici. Cette gare vide et sans âme me rappelle l'Inde et les interminables attentes à la limite du confortable. 



Après au revoir et merci encore pour tout à Bertrand, en route pour Santiago. Quatre heures de train climatisé en première classe. Depuis le monstre dans l'avion de l'aller, à chaque fois que je vois un môme de moins de quatre ans dans un transport, je lui envoie une injonction mentale péremptoire: «Attention, bébé, pas pleurer, pas crier! Non-non-non-non-non!». J'adore les bébés, mais pas quand ils font le souk pendant deux heures à côté de moi. Ça marche, on dirait! Dans notre divers trajets jusqu'ici, il n'y a eu que quelques pleurs parfois, rien d'insupportable.

Nous ne sommes pas assises dans le même wagon avec Stephanie et Renée, pour cause de réservation à des moments différents. Au bout de deux heures, nous prenons un sandwich du petit bar qui circule. Je me méfie de cette gastronomie, mais tant pis, j'ai trop faim. J'ai mis ma «masquerilla» autour de mon poignet pendant que je mange. Le contrôleur passe et me dit en espagnol avec des gestes que je comprends que «la masquerilla, c'est sur le nez, pas autour du poignet, ça sert à rien». Je lui réponds en français, avec des gestes qu'il comprend à son tour que: «Je suis en train de manger». Il rétorque, toujours dans la même langue: «Sur le nez». Je répète, un peu échauffée: «Mais je mange!». Alors là, il mime de baisser le masque, croquer une morce, remonter le masque et ruminer derrière le tissu.

J'en peux plus de ces conneries de masque!

J'obtempère et dès qu'il a le dos tourné, je mange normalement. — Et je n'exprimerai pas ici ma façon de penser parce que c'est pas beau d'être vulgaire...

Puis je somnole. Quand je ferme les yeux, je vois de la géométrie sacrée partout. Je suis en train d'intégrer mon stage, moi! Nous arrivons à St-Jacques de Compostelle vers 23h. Nous partageons un taxi à quatre pour nous rendre à nos hôtels respectifs et en se quittant, nous nous donnons rendez-vous pour le café demain matin. Nous avions hésité à nous rendre à pied à notre hôtel qui n'est qu'à 900 mètres de la gare, mais en voyant comment la rue grimpe, nous sommes bien contentes d'avoir opté pour le taxi.

Enfin arrivées. Dodo!

Oups, non, bloquées devant la porte qui ne s'ouvre pas malgré nos multiples tentatives.

Nous logeons dans un petit appartement dont l'accès se fait grâce à un code pour la porte palière et un autre code pour notre logement. Le premier fonctionne mais nous restons bloquées devant l'électronique du suivant qui refuse de coopérer. Fabienne appelle Pilar, notre logeuse, qui nous ouvre à distance — vive la technologie — et nous recommande de ne pas y aller trop fort, ce boitier requiert de la délicatesse.

En effet!

Nous sommes enfin dans la chambre, je ferme la porte et tourne le verrou.

Dodo!